•  Ces tableaux, une manière de voyager dans le monde de l'art,

    suivant la chronologie du temps. 

    Beaucoup d'artistes se sont frottés aux représentations pieuses.

    Et ici beaucoup ont représenté Marie interrompue dans sa lecture.

    Le livre comme une figure imposée par les textes?

    L'annonciation faite à Marie.  

    Pour ce long billet, la lecture la plus simple est de repérer le livre

    sur les différentes œuvres.

    Pour les textes, c'est selon votre envie, votre disponibilité.


    L’Annonciation selon l’évangile de Luc.


    Le sixième mois, l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée, du nom de Nazareth, à
    une vierge fiancée à un homme du nom de Joseph, de la maison de David ; et le nom de la vierge
    était Marie. Il entra et lui dit : « Réjouis-toi, comblée de grâce, le Seigneur est avec toi. »
    A cette parole elle fut toute troublée, et elle se demandait ce que signifiait cette salutation. Et l’ange
    lui dit : « Sois sans crainte, Marie ; car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Voici que tu concevras dans
    ton sein et enfanteras un fils, et tu l’appelleras du nom de Jésus. Il sera grand, et sera appelé Fils du
    Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père ; il régnera sur la maison de Jacob
    pour les siècles et son règne n’aura pas de fin. »
    Mais Marie dit à l’ange : « Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais pas d’homme ? » L’ange lui
    répondit : « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ;
    c’est pourquoi l’être saint qui naîtra sera appelé Fils de Dieu. Et voici qu’Elisabeth, ta parente, vient,
    elle aussi, de concevoir un fils dans sa vieillesse, et elle en est à son sixième mois, elle qu’on appelait
    la stérile ; car rien n’est impossible à Dieu. »
    Marie dit alors : « Je suis la servante du Seigneur ; qu’il m’advienne selon ta parole ! »
    Et l’ange la quitta ....

    ****

    Brigitte et Francine de la PTRL du pays de Cernay ont publié ces annonciations à la façon d'un calendrier de l'avent.

    PTRL .....  Pastorale des Réalités du Tourisme et des Loisirs 

    ****

    23 tableaux, et les commentaires qui accompagnent.

    Comment faire pour alléger cette publication?

    Peut être laisser tout le texte et vous proposer en brun, de quoi picorer des infos.

    Sinon, je vous le dis, cherchez les livres.

    Une manière de survoler les tableaux.

    Il y en aura peut être un qui va vous interpeller.

    À vos ascenseurs.

    Comme très souvent, je place les textes au dessus des documents.

    ****

    Si vous voulez juste observer les tableaux,

    très souvent on peut voir les éléments décrits ci dessous,

    à vous de repérer les exceptions. 

     

    Deux personnages représentés. Marie et l'ange Gabriel.

    Gabriel debout, Marie assise ou à genoux.

    Gabriel ange ailé avec des fleurs de lys à la main. Le lys de pureté.

    Marie interrompue dans sa lecture. Parfois d'un doigt elle maintient le livre ouvert

    façon marque ta page. Le livre est assez souvent représenté.

    C'est Anne sa Maman, qui lui a enseigné la lecture.

    L'annonciation faite à Marie.

     1

    Pour admirer la première Annonciation de notre parcours, il faut normalement se munir d’un
    miroir (fourni à l’entrée ). Nous sommes en Suisse, dans les Grisons. La petite église St Martin du
    village de Zillis possède un trésor : son plafond en bois peint entre 1109 et 1114. Une centaine
    de scènes racontent la vie du Christ jusqu’à la Passion.
    A première vue, la représentation est classique : un ange avec de grandes ailes arrive en
    virevoltant vers une Marie occupée à l’intérieur de sa maison, le tout dans deux « caissons » côte
    à côte.
    Mais quelques détails nous frappent : des rayons lumineux partent de la main droite de l’ange en
    direction de Marie et surtout, contrairement aux représentations habituelles, Marie n’est pas en
    train de lire ou de méditer, seule chez elle ; elle tient une quenouille, elle est en train de filer ;
    selon un texte apocryphe, Marie faisait partie des sept vierges de la tribu de Juda choisies pour
    tisser le voile du Temple….
    Un 3ème personnage assiste à la scène, une servante… nullement citée par Luc

      

     2

     Nous sommes au tout début du 14ème siècle (1308). Le Siennois Duccio di Buoninsegna peint un
    gigantesque retable pour la cathédrale, aujourd’hui au Musée de l’Oeuvre de la ville, à l’exception
    de quelques panneaux exposés dans des musées à l’étranger. Cette toute petite Annonciation (45
    X 46 cm) est à la National Gallery de Londres.
    L’ange Gabriel arrive de gauche, il est encore en mouvement, il vient délivrer le message divin,
    d’ailleurs il porte un bâton de messager, il bénit Marie, debout, devant sa maison à l’architecture
    complexe : espace ouvert pour l’ange, fermé pour Marie.
    Marie a été interrompue dans sa lecture, mais elle n’a pas abandonné son livre. Elle l’a gardé
    ouvert à la page entamée…, celle de l’Ancien Testament avec la prophétie d’Isaïe ?
    Dans un geste qui marque à la fois la surprise, la modestie et l’acquiescement, Marie répond
    qu’elle se soumet à la volonté divine, laquelle, parallèlement, est en train de se réaliser : avez-vous
    remarqué le rayon provenant de l’ouverture en haut au milieu du tableau? Un rayon éclairant une
    minuscule colombe, symbole de l’Esprit Saint, envoyée vers Marie ….
    Nous sommes au moment même de l’incarnation. La parole s’incarne au moment même où elle
    est énoncée. Une colonne sépare les deux personnages, l’un divin, l’autre terrestre. Un vase avec
    un bouquet de lys blancs posé à terre rappelle la virginité de Marie

     

     Cette Annonciation est la partie centrale du triptyque de Mérode, retable de Robert Campin
    également connu sous le nom de maître de Flemalle (1427-1432). Le volet de gauche montre la
    porte de la maison entrouverte avec deux personnages à genoux, les donateurs; le volet droit
    montre une autre pièce où Joseph est occupé à travailler le bois.
    Nous assistons à l’irruption de l’ange Gabriel dans l’intérieur de la maison bourgeoise flamande
    du 15ème siècle où vit Marie. De multiples détails prosaïques, documentaires presque : le volet
    de la fenêtre avec une claire-voie, le linge suspendu sur une tringle, le bougeoir avec la bougie qui
    fume encore, la pochette pour ranger les livres, la marmite suspendue. …etc. Un objet
    symbolique aussi : le vase de lys blanc. Les deux livres seraient l’Ancien et le Nouveau Testament
    Revenons aux personnages principaux : Gabriel est paré de belles ailes, il esquisse un geste de
    bénédiction, Marie est occupée à lire, elle n’a pas encore remarqué son visiteur….
    Il faudra zoomer pour mieux distinguer en haut à gauche du tableau : un minuscule enfant avec
    une croix est en train de descendre …. la vie de Marie va changer à tout jamais …
    L’oeuvre se trouve aujourd’hui aux Cloisters de New York.

    L'annonciation faite à Marie.

     

     4

    Cette Annonciation du peintre flamand Van der Weyden, très peu postérieure à celle de Robert
    Campin (1440) se trouve à Paris, au Louvre.
    Même atmosphère empreinte de sérénité, intérieur bourgeois et cossu.
    L’ange Gabriel revêtu d’un somptueux manteau, preuve de la virtuosité du peintre, paré de
    grandes ailes, est toujours à gauche, il bénit délicatement Marie.
    Marie vient d’interrompre sa lecture, elle a gardé le livre ouvert à la page lue, elle écoute le
    message de l’ange.
    On aperçoit bien le paysage par la fenêtre ouverte.
    Dans cette oeuvre magistrale, le mobilier contribue à donner le sens spirituel du tableau : le lustre
    a une seule bougie, éteinte, en attente de la lumière que le Christ va apporter au monde; l’ombre
    de la croix est déjà présente sur le panneau de bois qui obstrue la cheminée. La carafe au-dessus
    de la cheminée est comme le vase avec des lys symbole de pureté et de virginité : la lumière
    traverse le verre sans le briser comme l’Esprit vient sur Marie en préservant sa virginité …
    La pomme rappelle bien sûr le péché des origines, l’orange symbolise Marie : l’oranger porte en
    même temps ses fruits et les fleurs de la prochaine récolte, donc symbole de virginité et de
    fécondité.
    Les trois coussins rouges évoquent la Trinité. Sur le lit à baldaquin, même tissu rouge,
    symbolisant l’union entre Dieu et l’humanité que le « oui » de Marie va permettre…

     

     

     5

    1. Dans l’Italie de la Renaissance, l’Annonciation a lieu dans des palais avec marbres, colonnes, pilastres, arches de pierre.
      A présent, c’est l’ange qui est à genoux au pied de Marie, l’amour courtois a passé par là. Pas
      d’auréole, mais une délicate couronne de fleurs et de belles ailes composées de plumes.
      Marie est debout, elle accepte humblement le message de l’ange. Même main sur la poitrine pour
      les deux personnages qui ne se regardent pas.
      Du coin supérieur gauche, Dieu le Père entouré d’angelots, envoie la colombe de l’Esprit Saint. Le
      lys blanc est brandi par l’ange comme un sceptre. Autres symboles de virginité : le jardin clos à
      l’arrière, de même que le vase transparent aux pieds de Marie.
      Une servante, elle aussi porteuse d’une branche de lys, assiste à la scène.
      Silence, intériorité …une oeuvre magnifique (1447) de Fra Filippo Lippi à admirer à l’Alte
      Pinakothek de Munich.

     

     

     6

    Piero della Francesca a peint
    cette fresque qui fait partie du
    cycle La légende de la vraie
    croix de 1452 à 1459.
    Elle se trouve à Arezzo, dans
    l’église San Francesco.
    Marie ne reçoit pas passivement le message de l’ange, elle l’accueille avec majesté, sans être
    troublée. Interrompue dans sa lecture, elle garde le doigt glissé dans son livre pour pouvoir le
    reprendre. La main droite levée témoigne de son interrogation.
    L’ange, genou à terre, salue et bénit de la main droite; dans la main gauche, il tient une palme.
    En haut à gauche, Dieu le Père apparaît en mi-buste au dessus de l ‘ange, étendant les mains
    pour envoyer l’Esprit sous forme de rayons de lumière se dirigeant en diagonale vers Marie, les
    couleurs de leurs vêtements se faisant écho.
    Et c’est bien là le génie du peintre : il est aussi passionné de mathématiques. Tout est calculé
    chez lui. La composition de l’oeuvre est très géométrique. A chacun son espace en quelque sorte
    et la colonne sert à articuler la composition.
    Silence, majesté, dignité, élégance, virtuosité (le voile transparent de Marie, la marqueterie de la
    porte), les caractéristiques de Piero della Francesca

     

     

     7

    Cette Annonciation du grand Léonard de Vinci se trouve aux Offices de Florence.
    Peinte entre 1472 et 1475, elle fait une large place au paysage toscan de pins, de cyprès, aux
    multiples fleurs, témoignant de la passion de Vinci pour la botanique. Le passage dans le fond est
    dans la brume (le fameux sfumato !), les contours se diluent.
    La clôture est marquée par un simple muret donnant sur le paysage.
    Marie est surprise en train de lire devant sa maison sur un lutrin (qui fait penser à un berceau ou à
    un sarcophage .)… La porte de la maison est ouverte, on y aperçoit un lit.
    Marie est d’une beauté angélique, revêtue d’un manteau bleu, d’une robe rouge. Innovation du
    peintre : le revers jaune faisant une tache d’or sur son ventre, comme pour mieux souligner sa
    future maternité. Éprouve-elle de l’inquiétude? Est-elle surprise ? Si son expression est
    impénétrable (pensons à la Joconde), elle maintient le livre qu’elle lit à la bonne page…
    L’ange, cheveux longs, traits délicats, est posé au sol, ses ailes sont en train de se replier. De la
    main gauche, il tient le traditionnel lys et il bénit Marie de sa main droite.
    Remarquons que les deux personnages se regardent cette fois. Le regard de l’ange vers Marie est
    particulièrement intense.
    Ici tout est élégance (drapés des costumes, grâce de la chevelure de l’ange, attitude de Marie,
    légèreté du voile ornant le lutrin).
    Toute la nature est en fête, la création est en joie.

     

     8

    Je n’ai pas oublié la moitié du tableau ! Ceci est bien une Annonciation, l’Annunziata d’Antonello
    da Messina peinte en 1476 aujourd’hui exposée en Sicile (Palais Abatellis à Palerme).
    Marie sourit légèrement, lève la main pour dire oui et retient son voile pour mieux se recueillir. elle
    vient d’accepter de porter en elle le Fils de Dieu. Son visage lisse à l’ovale très pur n’exprime ni
    frayeur ni angoisse.
    Les triangles rigoureux que dessine le voile conduisent vers ce visage, éclairé d’une lumière
    douce. Pour ne pas nous distraire, Antonello réduit la couleur à un bleu profond et intense, qui se
    détache sur fond de nuit. Le peintre a l’audace de ne dessiner ni auréole autour de la tête de
    Marie, ni or sur ses vêtements, ni une demeure, un palais ou un temple qui montreraient sa
    grandeur. Il ne peint pas d’ange lumineux venu du ciel, il se passe de ces signes merveilleux : il
    concentre notre attention sur le visage et sur les mains de cette femme qui dit « oui », car c’est ce« oui » qui est merveilleux
    Cette toile échappe à la représentation conventionnelle de l’Annonciation puisque l’ange Gabriel
    est absent.
    Le spectateur devient, l’espace d’un instant, Gabriel lui-même.

     

     

     9

    Une Annonciation déconcertante à plus d’un titre !
    - un ange fondant comme un oiseau vers Marie
    - une Marie placée à gauche, se tenant à l’une des colonnes d’une sorte de terrasse,
    visiblement dérangée dans sa lecture, plus que surprise, effrayée, se protégeant de ce qui
    arrive sur elle ....
    - l’espace délimité très géométriquement. La perspective est linéaire, le paysage et le ciel
    occupent une grande partie du tableau.
    L’on peut être séduit par l’évocation des lointains du paysage, et par les coloris doux, notamment
    les jaunes et les ocres . (L’auréole de Marie est de la même couleur que sa robe !)
    Cette oeuvre de 1494 du peintre milanais Carlo Braccesco est la partie centrale (158 X 107 cm)
    d’un triptyque exposé au Louvre. Les panneaux latéraux représentent quatre saints

    version allégée

      

     10

    Contrairement à l’œuvre précédente, Marie et l’ange se regardent, nulle frayeur, mais une sorte
    de sérénité et de gravité.
    L’ange a mis genou à terre et il bénit Marie. Classiquement, il tient un lys dans sa main gauche.
    Deux autres anges, derrière Gabriel, assistent à la scène. Ils ne sont pas les seuls. Des
    personnages se tiennent sur le balcon, un autre personnage est assis sur un muret… bizarrement,
    aucun ne regarde la scène principale; ne perçoivent-ils pas son importance, ne la voient-ils pas ?
    Marie a été surprise dans sa lecture, elle esquisse un tout petit geste à la fois de surprise et
    d’acceptation
    La colombe de l’Esprit saint arrive de la droite.
    Marie se tient devant une majestueuse architecture avec une ruine classique à l’arrière plan. La
    lumière éclaire l’exact milieu de la scène et se diffuse.
    Cette oeuvre (1512-1514) d’Andrea Del Sarto se trouve aujourd’hui au Palais Pitti, à Florence,
    après avoir été commandée pour l’église San Gallo de Florence

     

      

     11

     Cette Annonciation de Lorenzo Lotto datant de 1528 est conservée à Recanati (Marches)
    au Museo Civico Villa Colloredo Mels.
    Loin de la traditionnelle représentation dans laquelle les deux personnages se font face,
    l'Ange à gauche, Marie à droite, ici Marie est placée à gauche, fait face au spectateur et
    tourne le dos à l'Annonciateur.
    Elle semble effrayée; interrompue pendant sa lecture, elle se tourne comme pour s'enfuir,
    mais se fige brutalement, consciente de la tâche qui lui est confiée. Elle lève les yeux au
    ciel et ses mains semblent refuser la nouvelle au lieu de l’accueillir.
    A l'arrière-plan, l'ange Gabriel lève le bras annonciateur de la future naissance de Jésus,
    mais son geste reste suspendu, surpris par la volte face de la Vierge.
    Dieu le Père, en haut à droite du tableau, effectue un signe de bénédiction de la scène qui
    se déroule sur terre. Son regard sévère et ses bras fermement tendus évoquent plus un
    ordre qu'une bienveillance.
    Un chat s'enfuit entre les deux protagonistes, symbole satanique effrayé par
    l’annonciateur.
    Là où les autres peintres représentent une scène élégante, paisible, empreinte de sérénité
    et d'équilibre, Lorenzo Lotto peint une Annonciation brutale, mouvementée et en même
    temps très figée

     

     12

    Cette très belle Annonciation (entre 1535 et 1540) du Titien se trouve à la Scuola Grande de San
    Rocco à Venise.
    Cette fois, Marie est pleinement consentante … tout se réalise : le message de l’ange, la venue de
    l’Esprit Saint /colombe qui envoie ses rayons, attirant notre regard vers Marie et éclairant le visage
    et les mains croisées de Marie …
    La scène se passe sur le péristyle d’un palais à colonnade. L’Archange Gabriel arrive sur
    un nuage, il ne touche pas terre, il est ailé, et tient un lys blanc, il est habillé d’un vêtement
    rouge garance, la couleur préférée du Titien. Il est muni de jambières, écho du messager
    des dieux de l’Antiquité grecque.
    Marie, agenouillée devant son lutrin, est en train de lire. Une balustrade laisse entrevoir,
    au-delà, un parc, un jardin clos peut-être, puisque « le jardin clos » est une des
    métaphores de la virginité et de la pureté de la Vierge.
    L’Esprit saint, traditionnellement représenté par une colombe blanche, est présent en haut,
    au centre, dans un demi-cercle de lumière. Un rayon d’or glisse jusqu’à l’oreille de Marie,
    incarnation du Verbe de Dieu, qui descend sur elle.
    On peut remarquer que Marie a les mains croisées sur sa poitrine : c’est la phase
    d’acceptation de cette désignation et du choix de Dieu. C’est la quatrième phase des cinq
    séquences de l’Annonciation, traduite par ce geste et ces mots : « Je suis la servante du
    Seigneur ». Elle accepte la salutation angélique et sa désignation lourde de
    conséquences.
    Au pied du lutrin, trois détails intéressants, trois symboles : un panier de couture, une
    pomme et une perdrix rouge. Le panier de couture caractérise les activités féminines
    d’une jeune épouse. La pomme au pied du lutrin rappelle bien sûr le péché originel par la
    faute d’Ève. La perdrix est l’oiseau consacré à la déesse de l’amour profane.

     

     

    13 

    Cette oeuvre de Federico Barocci séduit par sa douceur et sa sérénité, l’emploi de couleurs à la
    fois acidulées et audacieuses, la grâce des visages.
    L’ange, de jaune vêtu, est aux pieds de Marie, surprise dans sa lecture. Elle a d’ailleurs posé son
    livre pour dire son oui, matérialisé par son geste d’acceptation.
    Dieu le Père surplombe la scène dans un halo de rouge orangé et de jaune.
    Le peintre situe la scène en creusant l’espace intérieur d’une fenêtre montrant le château du duc d’Urbino, qui a commandé le tableau. Barocci pouvait contempler cette vue depuis son atelier.
    Le chat endormi sur une chaise tout en bas à gauche est là pour accentuer le caractère intimiste de la scène.
    Il existe plusieurs versions de ce tableau. Celle-ci datée en 1584 est exposée au Musée des
    Beaux-Arts de Nancy

     

    14 

    Dans la même salle du Musée des beaux-Arts de Nancy se trouve l ‘Annonciation (1609)
    de Michelangelo Merisi dit Le Caravage.

    Dans la partie gauche, un ange roux aux ailes sombres, enveloppé d'un drapé blanc et
    tenant un bouquet de lys, allonge son bras droit au-dessus de Marie, située dans la partie
    droite voilée de jaune et drapée de bleu. L'ange semble désigner de sa main droite, en un
    geste maniériste, le lit défait de Marie à l'arrière-plan.
    La perspective de représentation de la scène de l'Annonciation est particulièrement
    nouvelle avec une position haute et dans les airs de l'ange devant une Marie agenouillée
    alors que la représentation habituelle est inverse, avec un ange agenouillé devant Marie
    surprise dans sa lecture.
    L’artiste peint là une Vierge d’humilité, croisant les mains en signe de soumission à la
    volonté de l’Ange, chacun se situant de part et d’autre d’une grande diagonale imaginaire.
    Nouveauté : les sphères terrestre et céleste ne sont pas séparées, le divin et l’humain
    s’interpénètrent – le « nuage » de l’Ange descend quasiment jusqu’à terre, et aucun
    élément (fenêtre, colonne) ne le sépare de Marie. La scène, très sombre, est nue, épurée,
    peu d’accessoires viennent parasiter le dialogue – hormis un panier à ouvrage au premier
    plan, qui vient lester la composition et apporter un élément de contexte concret. Le drapé
    fluide de la robe de l’Ange part en flamme tourbillonnante, et produit de forts contrastes de
    lumière, qui elle-même rejaillit sur la scène. Là, plus que dans la figure de recueillement
    de la Vierge, réside l’essence de la ferveur caravagesque : violente, passionnée,
    tumultueuse.

     

     

    15

    Dans cette Annonciation, la lumière éclaire Marie, l’ange et la colombe au dessus de Marie.
    L’ange - vêtement blanc, belles ailes colorées, genou à terre - d’une main désigne Marie et de
    l’autre pointe vers la colombe, il est simplement là pour faire le lien entre le ciel et la terre.
    Marie, assise sur une petite estrade, a été interrompue dans sa lecture; elle porte un manteau
    jaune, comme une juive romaine de l’époque du tableau, le XVIIe siècle (Nicolas Poussin a peint
    cette oeuvre à Rome en 1657). Elle a le visage baigné d’une douce lumière, les bras tendus, les
    mains ouvertes : son corps, tout son être, reçoit la parole féconde. Elle est tout accueil.
    La colombe, inscrite dans un cercle solaire, plane au dessus de Marie, « l’Esprit saint couvre
    Marie de son ombre », de sa lumière aussi.
    L’incarnation est en train de s’accomplir …
    Cette oeuvre de Poussin est à contempler à la National Gallery à Londres

     

     

     16

    Le type de Marie surprise et apeurée est une des variantes iconographiques de l’Annonciation
    depuis la fin du Moyen Age. Mais ici, dans ce tableau de Dante Gabriel Rossetti, Marie est plus
    qu‘apeurée. Recroquevillée, elle semble prostrée, écrasée contre le mur. Son regard ne fixe pas le messager céleste, il se perd dans le vague.
    Lorsqu’elle fut exposée à Londres en 1850 sous le titre « Ecce Ancilla Domini » (Voici la servante
    du Seigneur), les critiques ne ménagèrent pas cette oeuvre pleine de nouveautés iconoclastes .
    Marie ne se tient pas en prière, elle est sur son lit, comme réveillée par l’ange. L’ange ? Il est
    dépourvu d’ailes, visiblement nu sous sa tunique ouverte sur le côté, ses pieds ne touchent pas le
    sol, ils sont couverts de flammèches…. Autre nouveauté troublante, l’ombre de Gabriel, visible au
    sol et sur le lit qui vient sur Marie.
    Le seul élément conforme à la tradition est la colombe de l’Esprit saint, entrant par la fenêtre
    ouverte.
    Et la broderie rouge au premier plan ? Pour comprendre sa symbolique, il faut se référer à un
    précédant tableau de Rossetti : L’enfance de la Vierge Marie où la jeune Marie est en train de
    broder un lys blanc, symbole de sa pureté virginale.
    A présent, la broderie, couleur du sang et de la Passion du Christ est terminée, le lys est brodé;
    l’Ange tend à Marie un lys réel : fini le temps de l’enfance, l’incarnation va s’accomplir, même si
    cela plonge Marie dans un abîme de réflexions…

     

    16 - bis

    Dante Gabriel Rossetti L’enfance de la Vierge Marie, 1849, Londres, Tate Britain

    Et la broderie rouge au premier plan ? Pour comprendre sa symbolique, il faut se référer à un
    précédant tableau de Rossetti : L’enfance de la Vierge Marie où la jeune Marie est en train de
    broder un lys blanc, symbole de sa pureté virginale.

     

     17

    Maria Alexandra Bell Eastlake (1864-1951) était une peintre canadienne surtout connue pour ses
    portraits de femmes et d’enfants, elle a côtoyé les Nabis, les peintres de Pont Aven.
    Cette Annonciation de 1895 (64 X 54 cm) est exposée au Musée des Beaux-Arts de Montréal.
    La scène a lieu à l’extérieur, - c’est nouveau - dans un paysage de fleurs et d’arbres; c’est la nuit : on distingue un croissant de lune dans le ciel.
    L’ange est aux pieds de Marie, il ne porte plus la traditionnelle tige de lys : Les lys font partie de la prairie. Il ne parle pas, il contemple Marie.
    Marie est habillée très simplement, robe bleue, cape rouge; elle est pensive certes, mais tout son
    corps est auréolé par un simple trait de lumière, écho de la chevelure flamboyante de l’ange.
    Ce qui frappe, c’est l’intériorité de la révélation : Marie a compris, ses mains sur son cœur en
    témoignent, elle regarde au loin, son destin va sortir de l’ordinaire….

     

     

     18

    Enfin une Annonciation qui se déroule au Moyen-Orient ! nous sommes dans une
    maison palestinienne, décorée à l’orientale avec tapis et tentures murales.
    Il est vrai que le peintre afro-américain Henry Ossawa Tanner rentre d’un voyage de
    plusieurs mois en Egypte et en Palestine. Fils d’un pasteur méthodiste, il se spécialise
    dans les sujets religieux.
    Deuxième innovation, malgré quelques précédents : l’ange Gabriel n'est pas
    directement visible ! il apparaît seulement comme un puits de lumière, une colonne
    lumineuse en lévitation.
    Marie est montrée comme une jeune fille timide, une adolescente vêtue de vêtements
    du Moyen-Orient, sans halo ou autres attributs sacrés qui permettent de reconnaitre son
    caractère "sacré". Elle a une expression très calme, très reposée. Elle reçoit l'ange avec
    humilité mais aussi une certaine crainte. Ses mains sont jointes, sa tête, légèrement
    inclinée, présente une expression étonnée.
    Marie regarde, écoute, se questionne et la nouvelle lui semble aussi étrange
    qu’inattendue…
    Cette oeuvre de 1898 est exposée au Museum of Art de Philadelphie

     

     19

    Paula Modersohn-Becker, née en 1876 à Dresde et morte en 1907 à Worpswede, est
    l’une des représentantes les plus précoces du mouvement expressionniste considéré
    comme « dégénéré » par le régime nazi.
    Au cours de ses quatorze années de vie d'artiste, elle réalise environ 750 toiles et un
    millier de dessins.
    Elle meurt des suites d'un accouchement difficile, à 31 ans et fait partie de toutes ces
    artistes femmes que l’on découvre ou redécouvre aujourd’hui.
    La peintre offre ici une version intime du moment où l’ange rencontre la Vierge. On a du
    mal à distinguer Marie et Gabriel dans un premier temps, ils portent des vêtements de
    couleurs très semblables, chacun tient une fleur blanche à la main, mais Gabriel est bien
    à gauche, on distingue ses ailes. Marie est assise et semble écouter attentivement et
    sereinement le messager …
    Cette Annonciation peinte en 1905 se trouve aujourd’hui au Vatican

      

     20

    Otto Dix (1891-1969) a aussi été associé à l’expressionnisme avant de fonder
    la « Nouvelle objectivité ».
    Il s’attache certes à une retranscription fidèle du texte biblique de
    l’Annonciation : le trouble de Marie face à l’apparition de l’ange Gabriel lui
    annonçant sa grossesse prochaine est clairement évoqué, mais le
    mouvement de recul de l’adolescente, le regard en coin, les joues
    rougissantes, la nervosité des mains, traduisent un sentiment de malaise
    augmenté chez Dix par le cadrage resserré, le geste de protection des mains
    et la réalité du très jeune âge de Marie.
    La scène se déroule dans un intérieur contemporain.
    L’oeuvre peinte en 1950 a été exposée au Musée Unterlinden de Colmar lors
    de la grande exposition consacrée à Otto Dix en 2017

    version allégée

      

     21

    Une jeune fille, un livre à la main, menue, délicate, assise, et peut-être si légère que son
    siège n’apparaît pas ? Elle était en train de lire et quelque chose lui fait lever les yeux et
    tourner la tête... une présence... un ange énorme, qui se plie pour entrer dans le cadre,
    pour se mettre à la hauteur de la jeune fille. Messager du Seigneur, il est l’envoyé, et
    peut-être sa taille évoque-t-elle la démesure du message qu’il porte. Aux couleurs de feu,
    sa chevelure évoque les flammes. Il est aussi couleur de terre, peut-être dans le sens du
    message qu’il transmet.
    Une main sur la gorge peut signifier une parole donnée, promesse de vie qui s’accomplit
    en Marie. Une Parole, un souffle, qui s’offrent à Marie, qui se posent, dans nos réalités,
    dans nos aujourd’hui, signifiés par cette nuée qui sort de la bouche de l’ange, cette
    goutte rouge-sang, qui tombe, sur un carrelage qui dit notre quotidien. Et le doigt de
    l’ange souligne cet ancrage, pour l’ici et l’aujourd’hui. Les deux yeux superposés
    signifient la force du regard de l’ange. Son visage enflammé traduit à la fois sa nature
    divine, spirituelle, et la vivacité du message qu'il porte à Marie, un Souffle qui donne vie,
    dans nos vies.
    Cette Annonciation se trouve dans l’église St Hugues de Chartreuse, entièrement décorée
    par Jean-Marie Pirot, alias Arcabas, entre 1953 et 1986

    ****

    Du même auteur, une autre représentation.

      

     22

    Cette Annonciation vous rappelle sûrement quelque chose !
    Oui, bien sûr, David Hockney, le peintre anglais vivant le plus connu au monde ( il est né
    en 1937), s’est inspiré de celle de Fra Angelico, qui le fascine depuis longtemps
    Il en a fait un tableau hexagonal, comme souvent chez lui, pour attirer notre attention sur
    la perpective inversée. D’ordinaire, les lignes de fuite se rencontrent derrière le fond du
    tableau.
    Ici le tableau a l’air de s’ouvrir, sa forme hexagonale renforçant cet effet.
    C’est celui qui regarde qui devient le centre du tableau.
    L’oeuvre a été peinte en 2017, soit presque six siècles après celle de de Fra Angelico
    (1436).
    Simplicité et sérénité …

     

     23 

    Il a fallu trois artistes pour cette oeuvre ! La participation des deux premiers est involontaire :
    Raphaël avait peint cette Madone en 1504 et Keith Haring ce « Radiant Baby » en 1990.
    Le Neo-Zélandais Owen Hippie, enfin, a orné en 2015 un mur de Brooklyn avec sa « Radiant
    Madonna ». Il fallait oser croiser la Renaissance et le 20ème …
    L’Enfant tant attendu rayonne d’énergie, de vie, de joie, d’espoir en l’avenir et Marie est toute
    tendresse ! c’est bien là le sens de Noël, non ?

     

    J'ai relayé ici, tout le travail de la pastorale de Cernay, Haut-Rhin.

    Deux fois dans l'année, leur travail illumine les abonnés à leur lettre de parution.

    Désolé pour la longueur inhabituelle de ces articles.

    En caractères GRAS, une manière d'alléger la lecture, tout en proposant le reste.

     

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    50 commentaires
  • J'avais entendu parler de la galette bouchère.

    Et cette année, concrétisation.

    En place de frangipane, un duo de viandes.

    Et sa fève qu'on vient de rajouter à la crèche.

    Le mouton de gauche.

    Même en république on fête les rois et les reines ....

    Une sorte de bataille des lobbies.

    Ainsi, les bouchers rattrapent un peu leur retard sur la pâtisserie-boulangerie.

    Déjà que les boulangers avaient le marché des hosties, et celui de la multiplication des pains!

    Les viticulteurs, le marché du vin de messe.

    Et celui des noces de Cana.

    Bon, j'allais oublier que le comble pour une dinde c'est de faire des projets pour Noël.

    Pareil pour les moutons de Pâques. Les bouchers ne sont pas les derniers à en profiter.

    À chaque confrérie ses fêtes, ses traditions.

    **** 

    Exposition de crèches.

    Réalisations de particuliers.

    Le thème des Rois Mages.

    Même en république on fête les rois ....

    Même en république on fête les rois ....

    Même en république on fête les rois ....

    Même en république on fête les rois .... 

    Même en république on fête les rois ....

     ****

    Je vous propose aussi cette photo prise sur place quand on était à Ravenne.

    Italie, Émile Romagne.

    Proche de Rimini.

    Sur ces plages, des touristes lisent des journaux.

    Style Vosges matin, L'Est Républicain, l'Alsace, les DNA :-))

    Le Grand Est n'est peut être pas le seul à priser cette destination.

    Même en république on fête les rois et les reines ....

     Une deuxième de mes photos, église Saint Pierre le jeune à Strasbourg.

    Même en république on fête les rois et les reines ....

     

    ****

    Ci-dessous une fresque de la Cathédrale d'Autun.

    Les Rois Mages avaient été prévenus en songe.

    Ne surtout ne pas retourner dire au roi Hérode,

    où se trouvait Jésus, le futur Roi.

    Mais Jésus sera le roi d'un autre royaume.

    Même en république on fête les rois et les reines ....

     

    S'en suivra la fuite en Égypte.

    La Sainte Famille ne repassera pas chez Hérode.

     Si je vais dans mes archives sur le thème des rois mages,

    on peut trouver des illustrations.

    Même en république on fête les rois et les reines .... 

    Même en république on fête les rois et les reines .... 

    Dernière minute, ce mardi, LASKA nous propose

    ses fèves façon Rois Mages.

    Même en république on fête les rois et les reines ....

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    61 commentaires


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